Même si les professionnels de la réadaptation ne prescrivent pas de médicaments, les effets (désirables et indésirables) des traitements pharmacologiques chez les personnes vivant avec le VIH peuvent avoir un impact sur les objectifs de la réadaptation.
Les objectifs du traitement médicamenteux pour le VIH sont :
- suppression maximale et soutenue de la charge virale
- réduction de la morbidité (maladie) et de la mortalité (décès)
- amélioration de la qualité de vie
2.5.1 Bienfaits du traitement antirétroviral (TAR)
Les progrès réalisés dans le traitement du VIH au moyen d’antirétroviraux efficaces, plus pratiques et mieux tolérés, ont considérablement modifié le cours de l’infection au VIH. Cela a donné lieu à une réduction nette de la morbidité et de la mortalité chez les patients qui ont accès au traitement7.
Les antirétroviraux ne guérissent pas le VIH. Toutefois, la fidélité au traitement la vie durant peut offrir à la plupart des individus une espérance de vie quasi normale.
Bienfaits du traitement antirétroviral
Sauve des vies. Le traitement antirétroviral a permis d’éviter près de 8 millions de décès liés au sida à l’échelle mondiale entre 1995 (taux maximum) et 20161.
Prévient de nouvelles infections au VIH. Le traitement antirétroviral réduit de près de 96 % le risque de transmission du VIH2.
Prévient la maladie. Le traitement antirétroviral réduit de 65 % le risque de tuberculose chez les personnes vivant avec le VIH3.
Permet des économies d’argent et favorise le développement. Le traitement du VIH peut générer des économies d’argent en l’espace de 5 ans 4. Les dépenses en traitement antirétroviral génèrent aussi des rendements économiques qui font plus que doubler l’investissement initial 5.
Maintient les gens productifs. Les adultes en âge de travailler qui vivent avec le VIH peuvent retourner au travail plus tôt lorsqu’ils reçoivent le traitement. Cela stimule leur productivité et réduit l’insécurité des ménages6.
1 World in Data. HIV and AIDS Deaths and Averted Deaths due to ART (to 2016). 2017.
2 Cohen MS, Chen YQ, McCauley M, Gamble T, Hosseinipour MC, et al. Prevention of HIV-1 infection with early antiretroviral therapy. N Engl J Med. 2011 Aug 11;365(6):493-505. doi: 10.1056/NEJMoa1105243. Epub 2011 Jul 18. PMID: 21767103
3 Suthar AB, Lawn SD, del Amo J, Getahun H, Dye C, et al. Antiretroviral therapy for prevention of tuberculosis in adults with HIV: a systematic review and meta-analysis. PLoS Med. 2012;9(7):e1001270. doi: 10.1371/journal.pmed.1001270. PMID: 2291101
4 Walensky RP, Ross EL, Kumarasamy N, Wood R, Noubary F, et al. Cost-effectiveness of HIV treatment as prevention in serodiscordant couples. N Engl J Med. 2013 Oct 31;369(18):1715-25. doi: 10.1056/NEJMsa1214720. PMID: 24171517
5 Resch S, Korenromp E, Stover J, Blakley M, et al. Economic returns to investment in AIDS treatment in low and middle income countries. PLoS One. 2011;6(10):e25310. doi: 10.1371/journal.pone.0025310. Epub 2011 Oct 5. PMID: 21998648
6 Maulsby CH, Ratnayake A, Hesson D, Mugavero MJ, Latkin CA. A Scoping Review of Employment and
HIV. AIDS Behav. 2020 Oct;24(10):2942-2955. doi: 10.1007/s10461-020-02845-x. PMID: 32246357;
PMCID: PMC7716244.
7 Mocroft A, Ledergerber B, Katlama C, Kirk O, Reiss P, d’Arminio Monforte A, Knysz B, Dietrich M, Phillips AN, Lundgren JD; EuroSIDA study group. Decline in the AIDS and death rates in the EuroSIDA study: an observational study. Lancet. 2003 Jul 5;362(9377):22-9. PubMed PMID: 12853195.
2.5.2 Lignes directrices thérapeutiques
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) publie des recommandations sur le diagnostic du VIH, les soins aux personnes vivant avec le VIH et l’utilisation des antirétroviraux pour le traitement et la prévention de l’infection au VIH à l’échelle mondiale.
Ces lignes directrices thérapeutiques concernent des populations spécifiques et fournissent des conseils sur la meilleure façon d’utiliser le TAR pour maximiser la réussite du traitement médicamenteux. Un lien vers ces lignes directrices est accessible ici : Update of recommandations on first- and second-line antirétroviral regimens.
2.5.3 Fidélité au TAR
Pour de meilleurs résultats, les personnes vivant avec le VIH doivent prendre leurs médicaments régulièrement, à la même heure tous les jours et de la bonne façon pour le reste de leur vie.
Lorsque la fidélité au traitement n’est pas totale, il est difficile d’obtenir une charge virale indétectable (ou la suppression de la charge virale) et le risque de développer une résistance aux médicaments augmente.
Tableau 2.5.3 : Exemples de facteurs qui facilitent ou freinent la fidélité au TAR
Facteurs qui facilitent la fidélité | Facteurs qui freinent la fidélité |
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2.5.4 Effets indésirables du TAR
Comme d’autres médicaments, les antirétroviraux ont des effets indésirables à court et à long terme. Ces effets indésirables peuvent affecter plusieurs systèmes de l’organisme et ils peuvent être de simplement ennuyeux à fatals.
Les professionnels en réadaptation peuvent aider les patients qui ont des incapacités dues aux effets indésirables des médicaments pour le VIH. Par exemple, plusieurs médicaments peuvent provoquer la polyneuropathie symétrique distale, caractérisée par une douleur, des picotements et un engourdissement bilatéraux aux membres inférieurs et aux pieds.
D’autres médicaments peuvent provoquer ce qu’on appelle la lipodystrophie, caractérisée par des anomalies métaboliques et des modifications de la morphologie du corps. Les changements corporels prennent la forme d’une réduction de l’adiposité des bras et des jambes, et d’une accumulation de gras autour de la taille ou de la nuque.
Il existe plusieurs médicaments pour traiter le VIH, il y a donc différents types d’effets indésirables. Pour connaître les effets indésirables associés à des médicaments spécifiques, consultez des sites Web à jour tels que :
2.5.5 TAR en prévention
Les progrès pharmacologiques récents incluent l’utilisation du TAR en prévention1. Cela inclut la prophylaxie pré-exposition (PPrE) au moyen d’antirétroviraux administrés par voie orale ou muqueuse afin de réduire le risque qu’une personne contracte le VIH2.
Les microbicides appliqués par voie vaginale peuvent réduire le risque de VIH. Même s’il semble y avoir une acceptation globale des microbicides de la part des femmes, ils ne sont pas encore accessibles sur le marché3.
Beaucoup de recherches ont porté sur les vaccins anti-VIH, mais la fabrication d’un vaccin sécuritaire et efficace demeure un projet à moyen ou long terme4.
1 Delva W, Eaton JW, Meng F, Fraser C, White RG, et al. HIV treatment as prevention: optimising the impact of expanded HIV treatment programs. PLoS Med. 2012;9(7):e1001258. doi: 10.1371/journal.pmed.1001258. PMID: 22802738
2 Desai M, Field N, Grant R, McCormack S. Recent advances in pre-exposure prophylaxis for HIV. BMJ.
2017 Dec 11;359:j5011. doi: 10.1136/bmj.j5011. PMID: 29229609
3 Notario-Pérez F, Galante J, Martín-Illana A, Cazorla-Luna R, et al. Development of pH-sensitive vaginal films based on methacrylate copolymers for topical HIV-1 pre-exposure prophylaxis. Acta Biomater. 2021 Feb;121:316-327. doi: 10.1016/j.actbio.2020.12.019. PMID: 33333257.
4 Jones LD, Moody MA, Thompson AB. Innovations in HIV-1 Vaccine Design. Clin Ther. 2020 Mar;42(3):499514. doi: 10.1016/j.clinthera.2020.01.009. Epub 2020 Feb 5. PMID: 32035643
2.5.6 Quelles précautions les professionnels de la réadaptation doivent-ils prendre au sujet du VIH et des infections connexes?
Quand on travaille avec des personnes vivant avec le VIH, comme avec tout autre patient, des précautions standard (souvent appelées précautions universelles) s’imposent.
- Les précautions standard requièrent un lavage des mains fréquent et entre toutes les interactions avec les clients.
- Les précautions standard incluent aussi l’utilisation de dispositifs barrière (p. ex., gants) lors de contacts avec le sang ou des liquides de l’organisme.
- Le port des gants n’est pas nécessaire lorsque la peau des clients est intacte. Toutefois, en présence de lésions cutanées ou de blessures ouvertes et/ou lors de contacts avec des liquides de l’organisme, le port de gants et d’une blouse à longues manches est approprié.
- Les aiguilles et autres objets tranchants doivent être utilisés et jetés de manière sécuritaire dans des contenants prévus à cet effet (sans essayer de remettre un capuchon sur une aiguille, par exemple)
Ce sont les mêmes précautions qui devraient être utilisées avec tous les patients, indépendamment de leur statut VIH.
Tableau 2.5.6 : Quels liquides de l’organisme peuvent contenir le VIH?
Liquides de l’organisme pouvant transmettre le VIH | Liquides de l’organisme qui ne transmettent pas le VIH |
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Même si les précautions universelles sont appropriées pour se protéger contre le VIH, une personne vivant avec le VIH qui n’a pas accès régulièrement au TAR peut aussi avoir d’autres maladies qui requièrent un niveau supérieur de précautions, telles que :
- Tuberculose pulmonaire (TB) – les précautions devraient inclure le port d’équipement de protection individuelle approprié
- Hépatite B – les précautions incluraient la vaccination
Pour plusieurs raisons, les travailleurs de la santé sont exposés à un risque plus grand d’exposition professionnelle à des maladies à diffusion hématogène, ce qui rend l’adhésion aux précautions universelles encore plus importante. Les raisons d’un risque accru d’exposition professionnelle incluent : 1
- Prévalence élevée de maladies dans la population de patients
- Gravité plus marquée des maladies chez les patients qui consultent
- Nombre plus grand de piqûres d’aiguilles accidentelles
- Habitude de recourir aux injections au détriment d’autres méthodes
- Utilisation de matériel et de techniques comportant des risques (p. ex., pipettes en verre, lancettes non rétractables pour les piqûres au bout du doigt)
- Nombre de travailleurs informels
- Absence de couverture vaccinale contre l’hépatite B
- Respect insuffisant des précautions universelles
1 Association canadienne de santé publique. Utilisez-vous systématiquement les précautions universelles?
2.5.7 Prophylaxie post-exposition (PPE)
Dans le cas d’une exposition professionnelle significative (p. ex., exposition a du sang ou à des liquides de l’organisme contenant du sang, telle que piqûre avec une aiguille creuse ayant servi à une ponction artérielle ou veineuse chez un individu avéré séropositif), la personne devrait immédiatement laver la zone avec de l’eau chaude savonneuse et consulter immédiatement un médecin (p. ex., dans un service d’urgence).
Une exposition significative pourrait nécessiter une prophylaxie post-exposition (PPE), un type de traitement antirétroviral plus efficace lorsqu’il est pris dans les 72 heures suivant l’exposition. Même si elle est raisonnablement efficace, la PPE n’est pas une garantie de protection et ne devrait être utilisée que dans les cas extrêmes1.
1 Centres de contrôle et de prevention des maladies. Post-Exposure Prophylaxis.