Les enfants immigrants et réfugiés qui arrivent au Canada sont exposés à un risque plus élevé de VIH comparativement aux enfants nés au Canada1. À mesure qu’un plus grand nombre d’enfants séropositifs ont accès au traitement antirétroviral, ils sont appelés à vivre plus longtemps, et en relativement meilleure santé. À mesure qu’ils avancent en âge, ils peuvent faire face à de nombreux défis liés au VIH, incluant les effets indésirables des traitements à long terme. Des études menées en Afrique subsaharienne ont montré que jusqu’à 50 % des enfants séropositifs présentent une forme d’incapacité, même lorsqu’ils prennent des antirétroviraux2, 3. Les professionnels de la réadaptation peuvent aider à identifier ces problèmes et dans bien des cas, offrir un traitement ou formuler des recommandations pour en atténuer l’impact.
Dans ce document, le mot réadaptation se définit comme tout service ou toute intervention qui cible ou prévient les incapacités physiques, les limitations d’activités et les restrictions de participation sociales chez une personne4. La réadaptation s’intéresse non seulement au bien-être physique, mais aussi aux dimensions mentales et spirituelles de la santé qui affectent la qualité de vie globale d’une personne. Il ne faut pas oublier que les enfants font partie d’une famille et d’une communauté et que leurs besoins doivent être pris en compte dans ce contexte.
Le VIH peut affecter différents systèmes de l’organisme et ses effets sont particuliers chez les enfants par rapport aux adultes. Les défis auxquels les enfants feront face changeront à mesure qu’ils grandiront, et il est donc important de les évaluer globalement à différents moments de leur croissance.
La Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé, version pour enfant et adolescent (CIF-EA) a été mise au point par l’Organisation mondiale de la santé car il fallait un outil universel pour colliger les caractéristiques des enfants en croissance et l’impact de leur environnement. Cette classification peut servir dans les secteurs de la santé, de l’éducation et des services sociaux. Elle offre une base commune pour mesurer et enregistrer la santé et les incapacités chez les enfants et les adolescents.
En 2012, une résolution a été proposée pour que l’OMS fusionne la CIF-EA avec la CIF afin de rendre cette dernière « plus simple et complète pour cibler tous les aspects du fonctionnement la vie durant »5.
1 Société canadienne de pédiatrie. Le VIH/sida chez les enfants et les adolescents.
2 Devendra A, Makawa A, Kazembe PN, Calles NR, Kuper H. HIV and childhood disability: a case-controlled study at a paediatric antiretroviral therapy centre in Lilongwe, Malawi. PLoS One. 2013 Dec 31;8(12):e84024. doi: 10.1371/journal.pone.0084024. PMID: 24391869
3 Knox J, Arpadi SM, Kauchali S, Craib M, Kvalsvig JD, Taylor M, Bah F, Mellins C, Davidson LL. Screening for developmental disabilities in HIV positive and HIV negative children in South Africa: Results from the Asenze Study. PLoS One. 2018 Jul 3;13(7):e0199860. doi: 10.1371/journal.pone.0199860. PMID: 29969474
4 Worthington C, Myers T, O’Brien K, Nixon S, Cockerill R. Rehabilitation in HIV/AIDS: development of an expanded conceptual framework. AIDS Patient Care STDS. 2005 Apr;19(4):258-71. PubMed PMID: 15857198.
5 Organisation mondiale de la santé. Implementing the merger of the ICF and the ICF-CY.
4.2.1 Adolescents et jeunes adultes
L’adolescence est une période de transition et de croissance durant laquelle plusieurs changements s’opèrent : physiques, émotionnels et mentaux1, et identité de genre. Il peut être particulièrement difficile de réagir à un diagnostic de VIH pour un jeune, surtout s’il est marginalisé pour des raisons liées à l’orientation sexuelle, la race, l’ethnicité, la maltraitance, l’itinérance, la précarité des conditions de vie ou la toxicomanie.
Autant que chez l’adulte, le diagnostic du VIH peut être traumatisant et il est souvent associé à la dépression et à une piètre estime de soi . Les adolescents séropositifs font face à de nombreux défis au plan de la santé2-4. Ceux qui ont un VIH acquis durant leurs jeunes années font face à des décisions sous d’importantes contraintes de temps. Ils doivent s’adapter rapidement à la stigmatisation et au fait de vivre avec une maladie chronique parce qu’il est crucial d’instaurer le traitement antirétroviral1. Le peu de connaissances sur le VIH et la stigmatisation qui y est associée nuisent à la fidélité aux traitements antirétroviraux chez les jeunes qui ont acquis le VIH par suite de leur comportement1. Les enjeux de dévoilement et d’observance thérapeutique peuvent être liés à la crainte de peiner ses proches et/ou d’être rejeté par sa famille et ses amis. Le soutien des amis, de la famille et de l’équipe interdisciplinaire1 peut pallier ces difficultés. Même si le VIH a de tout temps été associé à la malnutrition et à une perte de poids rapide, à l’heure actuelle, plus de la moitié des personnes qui ont acquis le VIH en raison de leur comportement sont, du moins au début, en surpoids ou obèses.
Un autre défi auquel les adolescents séropositifs font face est leur éventuelle transition vers les soins aux adultes. Dans la plupart des cas, l’équipe de soins pédiatriques a pris en charge les adolescents depuis leur naissance ou leur petite enfance, ce qui a créé un lien de confiance entre eux. L’adolescent doit développer son autonomie et apprendre à gérer son problème de santé à mesure qu’il approche de la transition vers les soins aux adultes5. Le processus de transition peut commencer quelques années avant le changement en bonne et due forme, en augmentant graduellement le niveau de responsabilité et en laissant à l’adolescent le temps de s’y habituer.
Souvent, pendant les années de transition, une travailleuse sociale ou un autre professionnel de la santé, accompagnera le jeune à la clinique pour adultes afin de l’orienter et de le soutenir. Une étude canadienne a révélé que des facteurs tels que n’avoir jamais eu recours à la protection de la jeunesse, n’avoir jamais vécu en famille d’accueil ou en foyer de groupe ont été associés à un bon état de préparation à la transition, tandis que la majorité des répondants faisaient état d’une qualité des soins pour le VIH équivalente ou meilleure après la transition6.
1 Spiegel HM, Futterman DC. Adolescents and HIV: prevention and clinical care. Curr HIV/AIDS Rep. 2009 May;6(2):100-7. doi: 10.1007/s11904-009-0015-y. PMID: 19358781.
2 Hazra R, Siberry GK, Mofenson LM. Growing up with HIV: children, adolescents, and young adults with perinatally acquired HIV infection. Annu Rev Med. 2010;61:169-85. doi: 10.1146/annurev.med.050108.151127. PMID: 19622036.
3 Lowenthal ED, Bakeera-Kitaka S, Marukutira T, Chapman J, Goldrath K, Ferrand RA. Perinatally acquired HIV infection in adolescents from sub-Saharan Africa: a review of emerging challenges. Lancet Infect Dis. 2014 Jul;14(7):627-39. doi: 10.1016/S1473-3099(13)70363-3. PMID: 24406145.
4 Sohn AH, Hazra R. The changing epidemiology of the global paediatric HIV epidemic: keeping track of perinatally HIV-infected adolescents. J Int AIDS Soc. 2013 Jun 18;16(1):18555. doi: 10.7448/IAS.16.1.18555. PMID: 23782474.
5 Fair CD, Sullivan K, Gatto A. Best practices in transitioning youth with HIV: perspectives of pediatric and adult infectious disease care providers. Psychol Health Med. 2010 Oct;15(5):515-27. doi: 10.1080/13548506.2010.493944. PMID: 20835962.
6 Kennedy VL, Mellor KL, Brophy J, Bitnun A, Alimenti A, et al. Transition from Pediatric to Adult HIV Care for Young Women Living with HIV. J Int Assoc Provid AIDS Care. 2020 Jan-Dec;19:2325958220903574. doi: 10.1177/2325958220903574. PMID: 32207355